AFP
14/04/09
LOME (AFP) — Le frère du président togolais, Kpatcha Gnassingbé, membre influent du parti au pouvoir, a été interpellé mercredi devant l'ambassade américaine à Lomé, dans ce qui semble être un nouvel épisode d'une profonde et ancienne rivalité familiale.
Les autorités judiciaires et gouvernementales togolaises n'ont pas fait de déclaration officielle sur cette interpellation spectaculaire, annoncée de sources concordantes notamment diplomatiques.
C'est en se présentant devant l'ambassade américaine, dont, selon des sources sécuritaires, on lui aurait refusé l'accès, que Kpatcha Gnassingbé a été interpellé, malgré son immunité parlementaire.
Une opération menée par des gendarmes avait visé son domicile dans la nuit de dimanche à lundi, dans le but officiellement d'arrêter des personnes soupçonnées d'"atteinte à la sûreté de l'Etat".
Selon des sources informées, des gendarmes en arme se sont à nouveau présentés chez lui dans la nuit de mardi à mercredi, mais le député du parti au pouvoir, le Rassemblement du peuple togolais (RPT), et ancien ministre de la Défense n'était plus à son domicile.
Les autorités avaient renforcé mercredi le dispositif de sécurité policière autour des missions diplomatiques à Lomé, visiblement pour éviter que Kpatcha y trouve refuge.
Selon un spécialiste du Togo, beaucoup de choses opposeraient Kpatcha et le président Faure Gnassingbé depuis le décès de leur père, Gnassingbé Eyadéma en février 2005.
"J'ai essayé de jouer les soupapes entre eux jusqu'au bout", confie un homme politique sous couvert d'anonymat.
Eduqué aux Etats-Unis, le jeune président, après des débuts difficiles (il avait d'abord été imposé par les généraux avant d'être élu lors d'une élection marquée par des violences), a su décrisper une situation politique bloquée avec l'opposition.
Des discussions sont d'ailleurs en cours avec les principaux partis d'opposition, surtout l'Union des forces de changement (UFC) de Gilchrist Olympio.
Depuis l'assassinat en 1963 du père de ce dernier, Sylvanus Olympio, premier président du Togo indépendant, lors d'un coup d'Etat auquel avait participé le futur président Eyadéma, la politique togolaise était cadenassée par cette guerre entre les deux familles.
Héritier du système politico-militaire de son père, Faure Gnassingbé a cependant réussi à imprimer une marque plus "moderniste" et "ouverte", indique un bon connaisseur du pays qui cite, pour preuve, la relative bonne tenue des dernières législatives de 2007 et la reprise des relations avec les bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux, notamment l'Union européenne.
Bruxelles avait coupé les ponts en 2003 pour "déficit démocratique".
Kpatcha représenterait l'aile plus "conservatrice" du système légué par celui qui avait dirigé fermement le pays pendant 38 ans jusqu'à sa mort il y a quatre ans.
Elu en octobre 2007 député de la circonscription de Kara (environ 420 km au nord de Lomé), principal fief du parti au pouvoir et surtout de la famille Eyadéma, il était jusque-là considéré comme un "poids lourd" du RPT.
Kpatcha, qui a un temps dirigé la zone franche du port de Lomé, a surtout été ministre de la Défense de 2005 à 2007, un poste sensible dans un pays où l'armée a un rôle important et dont il a été écarté.
D'après de très bonnes sources qui ont requis l'anonymat, un autre frère de la famille, Rock Gnassingbé, ancien président de la Fédération togolaise de football et actuel commandant d'une unité de blindés, serait venu au domicile de Kpatcha pour faire cesser l'attaque après avoir parlementé avec les responsables de l'opération.
Signe de la gravité de la situation, le président avait décidé dès dimanche de reporter son départ dans la soirée pour Pékin. Il ne s'est pas encore exprimé sur cette affaire.
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