Rwanda: Après 45 ans, le pays essai d’effacer les séquelles du premier coup d’état africain.

El Memeyi Murangwa 

01/07/07 

paul_kagame.jpgOn ne le dit pas souvent, mais la réalité est que l’indépendance du Rwanda est bel et bien intervenue après le premier coup d’état fomenté par la Belgique et l’église catholique sur le continent africain. Cette prise de pouvoir connue sous le nom de coup d’état de Gitarama signé colonel Logiest est l’élément précurseur du génocide que le Rwanda allait connaître en 1994. En 1900, l’arrivée des missionnaires catholiques belges, suivi de l’implantation du christianisme brisa la mémoire d’une solide monarchie et mit fin à Ryangombe, unique valeur spirituelle du pays, réunissant les Tutsi, Hutu et Twa dont le chef spirituel n’était autre que le Mwami (Roi) qu’assistait les gardiens de la tradition (Abiru).  Le monarque Yuhi V Musinga taxé  d’être contre l’expansion du christianisme et d’encourager les pratiques fétichistes de la religion dite « païenne » sera mis sous arrêt, destitué et déporté vers Moba (Katanga) ou il trouvera la mort dans des circonstances connues seul du colonialiste Belge.  Pour contenter les redoutables chefs traditionnels, il sera remplacé par son fils Mutara III Rudahigwa à qui les colons et prêtres blancs donnent le prénom envoutant de Charles, il mourra sans laisser une progéniture.  Les chefs traditionnels refusant d’embrasser la nouvelle religion seront banni et remplacer par des chefs plus collabos.  L’élite intellectuelle du pays sera mise sous surveillance de peur de voir le pays basculer de nouveau dans sa religion traditionnelle, le lendemain de la publication du manifeste Congolais (1956) réclamant l’indépendance du Congo Belge, Ruanda-Urundi.

Ce climat de méfiance aboutira en 1959 à l’assassinat du Mwami Mutara III Rudahigwa qui ne cache pas ses ambitions indépendantistes et qui exige une enquête sur la déportation et l’élimination de son père, Mwami Yuhi V Musinga à Moba (Baudoinville).  En visite médicale à Usumbura (Bujumbura), il sera victime d’une injection coloniale.  

Coup d’état de Gitarama 

Le Roi ne laissant pas un fils, sera succédé par son jeune frère, Jean Baptiste Ndahindurwa qui prendra le nom dynastique de Kigeli V, vivant à ce jour en exil aux USA.  Dès 1959, les colonialistes belges provoquent des troubles et encadrent les milices dans des massacres à grandes échelles, provoquant le dépeuplement du pays. Le 28 janvier 1961, le clergé catholique décidé à liquider la monarchie, organisera le premier coup d’état du continent africain avec l’aval de la tutelle belge.  Sous haute protection des para-belges, un congrès réunissant les bourgoumestres des partis exclusivement Hutu tiendra ses assises dans les installations de l’archevêché Catholique de Gitarama et proclamera la première république que dirige le Président Dominique Mbonyumutwa, assisté de Grégoire Kayibanda comme premier ministre, longtemps secrétaire particulier de l’archevêque.  La Belgique craignant l‘interférence de l’ONU, cherchera à donner une légitimité à son push en organisant des élections bâclées sans la participation de l’ethnie Tutsi dont les membres survivants du premier génocide de 1959 sont exilés au Burundi et en Ouganda.  Le 1 juillet 1962, la Belgique accordera l’indépendance au Rwanda après une révolution de palais, hissant Grégoire Kayibanda à la tête du pays. 

La première république 

La nouvelle République rwandaise, inversera la pyramide traditionnelle du pouvoir, brisera la conscience nationale traditionnelle et effacera la mémoire de la nation. La République définit son identité par l’abolition de l’ordre ancien dominé par la monarchie Tutsi.  Elle fondera sa légitimité sur la supériorité numérique de l’ethnie Hutu. Le nouveau pouvoir ne tardera pas à mettre en place un système de quotas limitant l’accès à l’enseignement supérieur et à tous les services publics à 9% pour les Tutsis. Pour la réussite de l’apartheid, les nouveaux dirigeants Parmehutu imposeront la mention de l’ethnie sur la carte nationale d’identité facilitant l’exclusion d’une partie de la population. Ils ne cesseront de clamer à qui veut l’entendre que le parrain (Eglise Catholique) a levé l’interdit. Des milliers des Tutsi seront massacrés avec l’aide d’une honteuse coopération technique militaire belge en 1963, 1966 et 1972. 

La deuxième république 

En juillet 1973, soucieux de rompre avec un passé compromettant, la Belgique encouragera le chef d’état major de l’armée, le général Juvénal Habyarimana à prendre le pouvoir sans effusion de sang. Il pratiquera l’exclusion élégamment et s’ouvrira au monde extérieur en nouant des relations avec une France qui ne cache pas son antipathie a l’égard des éleveurs des gros bétails, fiers et insubordonnés. Ces Tutsi rappelant bien à la cellule africaine de l’Elysée, les peuls guinéens difficiles à apprivoiser comme le disait Jacques Foccart.  Aucun Tutsi ne peut devenir ministre ou faire partie de l’armée nationale.  Habyarimana supprime aux Tutsi tout accès aux services publics. En 1973, des milliers des jeunes Tutsi persécutés émigreront au Canada et dans les pays occidentaux. Victime d'une discrimination constitutionnelle, la diaspora Tutsi s’organisera pour le retour au Rwanda au sein d’un mouvement politico-militaire qui ne tarde pas à amener le dictateur Habyarimana sur la table de négociation à Arusha (Tanzanie).  Les faucons de son pouvoir, la maisonnée (Akazu) ne lui pardonneront pas la signature des accords de paix et  de retour d’Arusha son avion terminera sa trajectoire dans le jardin de son palais.  Attentat ou crime organisé, le capitaine Barril, officier Français détenteur de la boite noire ne livre toujours pas son secret !  

Le génocide de 1994 

Au lendemain de la mort du Président Juvénal Habyarimana, la chasse aux Tutsi débute à travers le pays.  Les militaires rwandais et les miliciens Interahamwe encadrés par les militaires Français sillonnent le pays, tuant à la machette les Tutsi. En 100 jours, plus d’un million des personnes sont massacrées.  Le doux paysage rwandais offrant au monde entier les images les plus macabres de l’histoire contemporaine.  Tout ceci se passe devant la mission des nations unies au Rwanda voulue sans mission spécifique.  Pour protéger les génocidaires, la France déploiera l’Opération Turquoise à l’est du Zaïre  et permettra a ces forces négatives de s’installer en RDC ou ils continuent 13 ans après à semer la mort. 

Panser les plaies 

Malgré la création d’une zone humanitaire sure, voulue fief du gouvernement génocidaire, le Front Patriotique Rwandais intensifiera les combats pour sécuriser la population et réussira à mettre en débandade la légion de l’hexagone qui abandonnera un lourd fardeau au Congo dans sa partie orientale.  Le nouveau pouvoir mettra en place un gouvernement d’union nationale qui s’attèle à la reconstruction du pays en pensant les plaies et en en effaçant difficilement les séquelles du premier coup d’état du continent africain.  Les Gacaca (tribunaux populaires) et l’abolition de la peine de mort parviendront à vaincre la méfiance ethnique.   

La paix retrouvée dans ce pays des milles collines ne pourra pas être facilement perturbée par les faiseurs des tornades qui se butent désormais devant une nation à commandement unique. L’actuel régime que dirige le Président Paul Kagame est décidé à rompre avec les inégalités du passé.   

 

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