Antoinette K. Kankindi
Navarre, 21 Octobre 2007
Le parti qui contrôle le pouvoir à Kinshasa s'est cru dans l'obligation de fournir une liste de Tutsis représentés dans les différentes instances de la RDC d'aujourd'hui. Le PPRD prend soin de souligner q'il y a beaucoup d'autres communautés nationales qui ne sont même pas représentées au sein de nouvelles institutions de la dite troisième république congolaise, si république il y a encore. D'emblée la majorité présidentielle, qui multiplie ses bévues médiatiques en croyant faire montre de doigté, s'accuse elle-même sans y être forcée : son mandat n'est pas vraiment représentatif. S'il y a des communautés congolaises pas du tout représentées, la majorité qui nous gouverne n'a rien de démocratique ni de majoritaire. Cela pour commencer et nous le savions d'ailleurs. Mais le but poursuivi par la publication d'une liste exhaustive de Tutsis représentant la minorité persécutée a d'autres objectifs. On peut en avancer de plus évidents, peut-être deux seulement. Ils démontrent tous les deux que le régime PPRD est en mal de démocratie, ce qui fait qu'il ne soit pas étonnant qu'il se caractérise par des dérives dictatoriales que de mesures démocratiques.
Premier objectif : dans l'entreprise de la chasse au Tutsi menée par Joseph Kabila et ses lieutenants du genre le ministre de guerre, le xénophobe Y.Ndombasi, les non moins xénophobes députés magrivi du Nord-Kivu, cette liste de Tutsis rappelle trop les listes que le MRND, parti de feu Habyarima, dressa au Rwanda en préparation du génocide de 1994. Le parti cher à Kabila et Kamerhe donne les noms et postes de ces Tutsis, il ne manquait sur la liste que leurs photos, adresses et membres de leurs familles à éliminer. C'est une décision presque parlementaire d'élimination physique. Il faut prévenir le monde, haut et fort, dès à présent, que cette liste dressée en détail est une épée de Damoclès suspendue sur la tête de ces quelques individus, cibles on ne plus faciles pour les faucons xénophobes de Kinshasa. C'est le cas de dire que Ruberwa, dans sa maladresse qui surprend dans le chef d'un avocat, a fourni à ces faucons, sur un plateau, l'occasion de rendre la vie impossible à ses congénères.
Deuxième objectif : la majorité régnante essaie de rectifier le tir pour le Raïs qui a déjà compromis d'une certaine manière son voyage aux USA. Son alliance avec les forces génocidaires dans sa guerre contre Nkunda, son refus de négocier les revendications politiques, combien légitimes, du CNDP contre l'opinion de la communauté internationale sont inacceptable pour un pays qui se dit champion de la démocratie. Pour ne pas apparaître au pays de l'oncle Sam dans son personnage dictatorial, il essaie de démontrer la démocratie chez lui. Et pour preuve, il veut montrer des Tutsis dans son régime. Ce qui est drôle c'est que la liste présente par exemple un Masunzu, qui a vendu sa conscience à Kabila, comme tout le monde le sait ; et un Mutebusi –ne rigolez pas- en exil !!! Voilà qui en dit long sur ce que le PPRD appelle représentation démocratique.
Cependant, il faut rappeler au public, au Raïs et à sa majorité au pouvoir, qu'on est là devant une autre diversion. Au fond on dirait que c'est la seule stratégie que le nouveau régime connaisse. Les USA et le monde n'ignorent pas que le point le plus faible du gouvernement Kabila dans les questions de l'Est consiste en sa détermination de travailler avec les génocidaires contre une minorité, mais avec des conséquences incalculables immédiates pour le reste du pays et pour la région. Le PPRD semble ne pas avoir tenu compte du fait qu'il est parfaitement possible de dresser une liste plus longue que celles des Tutsis, mais montrant exactement les hutus génocidaires dans l'armée, dans les institutions à Kinshasa et dans les divers ONGs qui se disent soit de la société civile, soit des humanitaires, soit de défenses des droits de l'homme. Ils sont nombreux à supporter Kabila dans sa détermination à rendre la vie des Tutsis congolais impossible au Congo. Il croit qu'il se sert de ces génocidaires, mais ce sont eux qui se servent de lui dans leur dessein de déstabiliser le Rwanda, l'Ouganda et le Burundi. Cette seconde mission, la menace contre les pays voisins, qu'il s'est adjugé et qui est devenue sa priorité en lieu et place du développement du pays, ne va pas dorer son image avant son rendez-vous avec Georges Bush à la fin de cette semaine qui commence.
Le limogeage de l'ami des FDLR William Swing devrait fournir au pouvoir à Kinshasa une leçon importante. L'on se demande à quand le limogeage de Babacar Gaye, le commandant de la Monuc qui n'a pas peur d'affirmer que la mission de paix qu'il commande aide le gouvernement à affirmer l'autorité de l'Etat, en faisant la guerre à son propre peuple. En affirmant la présence constante de la force de l'ONU aux côtés des FARDC et leurs alliés génocidaires dans leur offensive contre les insurgés, cet officier montre qu'il entraîne son institution hors de la mission de paix. Ses propos montrent les proportions du manque d'éthique au niveau le plus haut de la gestion de la Monuc. Espérons que le nouveau patron de cet organisme veillera à ne pas embrasser cette tendance discréditant si bassement les Nations Unies.
Le Raïs et son parti devraient aussi savoir que les yeux doux qu'ils font aux chinois au détriment des intérêts de ceux qui les ont portés au pouvoir ne rassurent pas les démocraties occidentales. Et d'ailleurs on peut le voir dans l'acharnement des Belges à accaparer l'affaire Kahemba en profitant du fait que tout le pays vocifère contre le CNDP. Ne parlons pas du ministère de la défense de notre ancienne métropole embourbé dans une affaire de détournement de fonds qui sont allés où ? N'est-ce pas dans la campagne de Kabila ? Juste une supposition. Il ne suffit pas d'appeler les chinois à la rescousse pour avaliser une dictature qui est en train de se muer en régime génocidaire.
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