RDC: La Miba vendue à RawBank

Si l’on n’y prend garde.

L'Avenir

21/05/07

miba.jpgPour 11 millions de dollars américains accordés par RawBank à la Miba sous forme d’un prêt, cette banque exige à cette entreprise d’hypothéquer ses certificats d’exploitation miniers. * Aux termes des conditions de la transaction et la situation qu’elle traverse actuellement, la Miba sera incapable d’honorer l’engagement de rembourser la RawBank dans le délai fixé au 25 juin 2007 pour la première échéance de remboursement * D’où, la crainte de voir cette entreprise bradée au profit de cette banque * Mais, il est encore temps de sauver cette entreprise qui a besoin d’un montant supérieur à ces 11 millions de dollars sollicités auprès de RawBank * La Miba vaut plus que cet argent et elle est un symbole que la Rd-Congo ne doit aliéner à aucun prix.

Au moment où le gouvernement et les autres amis de la République démocratique du Congo s’investissent dans des actions en faveur de la revisitation des contrats léonins dans le secteur minier principalement, la Minière de Bakwanga (Miba) court présentement les risques de devenir la propriété d’une banque internationale.

La RawBank approchée par le comité sortant Luabeya en quête d’un prêt pour redynamiser l’activité de cette entreprise de l’Etat, avait répondu favorablement à cette sollicitation mais comme il est de coutume dans ces domaines, le créancier a posé ses conditions. Lesquelles conditions sont suicidaires dans le chef de cette entreprise du Portefeuille de l’Etat. La Miba devra en fait hypothéquer les certificats d’exploitation miniers, apprend-on, dans ce marché qui lui sera impossible, selon toute évidence, de répondre à ses obligations vis-à-vis de RawBank.

Selon nos sources, dans le montant sollicité qui est évalué à 11 millions de dollars américains, la Miba n’en jouira dès lors que de 9,8 millions du fait que 2,5 millions sont déjà gagés au titre de salaires des agents et cadres de l’entreprise. Et la source de poursuivre en indiquant que le solde, après mise en réserve de la première échéance de remboursement fixée au 25 juin 2007 (c’est-à-dire dans un mois et quatre jours) ne sera que de 6,4 millions. Or, ce dernier montant qui est de loin inférieur aux besoins de payement à la fois des salaires des agents et du démarrage de la production et l’achat des consommables, ne permettra pas à cette société d’atteindre l’objectif visé par la démarche entreprise par les anciens dirigeants de cette entreprise publique.

A part ces conditions draconiennes posées par la banque, et le délai trop court de remboursement, la transaction est également reprochée d’autres faits dont la faiblesse de l’intervention face au besoin exprimé et l’absence de différé d’amortissement sans parler de la préservation des écosystèmes dans l’aire d’activité de la Miba. Selon une étude menée le mois dernier par certains experts et le management de la Miba, cette entreprise a besoin d’un financement d’au moins 75 millions de dollars américains pour faire face aux investissements indispensables, sans compter les besoins en remboursement de ses dettes et en fonds de roulement, dit-on.

Par ailleurs, compte tenu de l’état actuel de cette entreprise et l’importance qu’elle revêt pour la nationale dans ce pays, la Miba a un besoin en capitaux à moyen et à long termes en lieu et place de cette offre de prêt RawBank aussi limitée.

Il est vrai que la Miba comme bon nombre d’entreprises relevant du Portefeuille de l’Etat éprouvent beaucoup de problèmes qui nécessitent un apport de capitaux frais pour les relever. Cependant, il ne faut pas que ces entreprises soient bradées aux premiers venus dans cet acharnement de gagner de l’argent à tout prix, même au préjudice des intérêts de la nation. La somme que cette banque s’apprêterait à mettre à la disposition de la Miba serait probablement acquise par d’autres voies grâce à un appel des fonds intérieurs, en ce sens qu’il existe des compatriotes nantis et autres personnes qui seraient sollicités et qui voleraient au secours de cette entreprise en donnant tout ou partie du montant à des conditions qui ne sont pas aussi draconiennes que celles posées par cette banque. La fibre patriotique qui ne vibre pas assez dans le mental du Congolais serait à la base de telles maladresses qui consistent à accepter des offres qui sont en soi de la poudre qui nous est jetée aux yeux. Aussi la résistance qu’affichent certaines personnes capables de voler au secours d’une entreprise aussi importante pour la nation est une attitude coupable.

" Pas de vie aux Kasaï sans Miba ", ne s’empêchaient d’avouer des générations entières qui ont bénéficié, d’une façon ou d’une autre, des services de cette société dans ces provinces, autant que les Katangais se reconnaissaient dans la Gécamines. Et quelles que soient les difficultés qu’éprouvent aujourd’hui les agents et cadres de cette entreprise et même la population entière, les conditions de la Raw Bank sont un morceau dur à avaler.

Pour l’intérêt de la nation, nous espérons que cette transaction (qui est toujours en cours) ne réussira pas. A la rigueur, elle sera revue pour en sortir une mouture dans laquelle les deux parties trouvent leur compte. Sinon, elle sera versée dans le compte des contrats léonins aujourd’hui décriés de par son aspect d’un marché des dupes.

P.M

La situation actuelle de la MIBA est catastrophique

La marche de la société est aujourd’hui caractérisée par : 1.Un arrêt quasi-total de la production. Entre 2004 et 2006, la production a baissé de plus de moitié. A la fin de l’année 2006, la production était ainsi de 2,8 millions de carats pour l’ensemble de l’année 2006 alors qu’elle était encore de 7,2 millions de carats en 2004. Toutes choses égales par ailleurs, la production de la MIBA devrait être d’à peine 500.000 carats en 2007. La production a été de 100.000 carats en moyenne pour les mois d’octobre, novembre et décembre 2006, ainsi que ceux de janvier et février 2007. La production a quasiment stoppée depuis cette date. Un chiffre d’affaire en deçà du seuil de rentabilité. Les ventes de diamants ont représenté en 2006 un chiffre d’affaire de 39,4 millions de dollars alors qu’un minimum de 80 est nécessaire pour couvrir les dépenses courantes. Le résultat d’exploitation qui était encore positif en 2003 (+1,3 millions USD) est devenu négatif en 2004 (-2,7 millions USD) et 2005 (-12,9 millions USD) et ce déficit a atteint 39,5 millions de dollars en 2006. "Les pertes durables de la société se chiffrent ainsi à 67 millions de dollars" selon le rapport des commissaires aux comptes de la société qui notaient le 29 mars 2007 que " le capital de la société s’est réduit de plus de 50% du fait des pertes cumulées, enregistrées au 31 décembre 2006 ". Un endettement de l’ordre de 170 millions de dollars. La dette de l’entreprise pèse sur elle comme un boulet. Elle comporte notamment une dette à moyen et long terme de 47,6 millions de dollars et une dette à court terme de 120 millions de dollars. Cette dernière comprend : une dette à l’égard des clients et fournisseurs de 69,3 millions de dollars ; des arriérés de salaires de 39,2 millions de dollars dus aux personnels en activité ou retraités ; une dette de 10,8 millions de dollars due aux organismes financiers et bancaires ; une dette fiscale due à l’Etat et aux organismes paraétatiques d’environ 10,5 millions de dollars (l’Etat devant lui-même près de 80 millions à la MIBA). En 2006, le déficit de trésorerie de la société a atteint plus de 40 millions de dollars hors investissement. En 2007, la situation sera pire. Face à un tel endettement : les fournisseurs ne livrent plus de pièces de rechange ou de consommables sauf à être payés avant livraison ; les banques refusent tout crédit supplémentaire et les investissements nécessaires pour renouveler le matériel minier ont été suspendus ; la situation sociale se dégrade peu à peu et le mécontentement des travailleurs a aboutit à une paralysie de la production. 2. Quelques raisons les plus significatives de cette situation. *La baisse des teneurs géologiques suite à l’épuisement des gisements détritiques ; L’envahissement quotidien du polygone minier par les creuseurs artisanaux, cause d’une insécurité généralisée du polygone MIBA ; * Le maintien de charges de personnels au-delà du raisonnable par rapport au chiffre d’affaire de la société et aux charges qui pèsent sur elle ; *La vente de la production à des tarifs inférieurs à ceux du marché aux deux acheteurs contractuels (…) privant ainsi la société d’une partie importante de ses recettes ; * Les difficultés d’approvisionnement en carburant, lubrifiant et pièces de rechange consécutives aux perturbations du trafic ferroviaire ;
- Le manque à gagner dû à l’arrêt de la production consécutif à l’ensemble de ces perturbations et aux arrêts de travail ;
- Le renchérissement du prix du gasoil combiné à la dépréciation du dollar par rapport au Rand et à l’Euro ; * L’impossibilité de réaliser les investissements nécessaires au maintien de la production antérieure. Le rapport d’audit de KPMG était de ce point de vue très clair dès la fin de l’année 2005 : " La structure financière est profondément déséquilibrée. Dans un environnement international, la MIBA serait obligée de se déclarer en faillite ".

L'Avenir

Leave a Reply