Par le Général-Major Laurent NKUNDA MIHIGO, Chairman du CNDP
Vision du CNDP: Restaurer la dignité des Congolais et du Congo.
10/10/09
Un mouvement authentiquement congolais.
Dans notre pays comme à l’étranger, d’aucuns font grief à notre Mouvement de confiner son combat à la défense de la seule cause des Tutsi congolais. Au mieux, ils y perçoivent un complexe de persécution communautariste, au pis, ils soupçonnent carrément une tentation séparatiste. Les plus irréductibles considèrent même le CNDP comme le cheval de Troie d’hypothétiques prétentions irrédentistes du Rwanda sur le Kivu. Voir ainsi les choses relève soit de la mauvaise foi, soit de l’hypocrisie, soit encore d’une ignorance coupable. Aux tenants de la thèse du cheval de Troie, nous opposons ceci, sans crainte d’être contredit : l’AFDL et le RCD ont été créés à l’initiative du FPR respectivement en 1996 à REMERA, un quartier de KIGALI, et en 1998 à KABUGA, dans la banlieue de la capitale rwandaise. Le CNDP, par contre, est né sur le sol congolais, avec pour promoteurs, des filles et fils du Congo. En 2004, en effet, dans la plus grande discrétion, mes camarades et moi-même l’avons conduit sur les fonts baptismaux à BWIZA, dans les environs de KITCHANGA, en Territoire de RUTSHURU, Province du Nord-Kivu. Depuis lors, il n’a jamais reçu du Rwanda ni un seul comprimé ni une seule cartouche, ni encore moins une seule directive.
C’est pourquoi, contrairement aux dirigeants des précédentes insurrections parties du Kivu -à commencer par celle des KABILA père et fils- ni moi-même, ni mes compagnons de lutte n’avons nos habitudes hebdomadaires à Kigali. Ainsi, depuis 2004, la seule et unique fois qu’on m’ait brièvement aperçu dans la capitale du « pays des mille collines », c’est fin 2006-début 2007. A cette époque, le Président rwandais Paul KAGAME est devenu officieusement médiateur dans le conflit armé CNDP-Gouvernement congolais, à la demande expresse et insistante du Président Joseph KABILA. Son homme de confiance, le Général James KABAREBE, Chef d’Etat-Major des Forces de Défense du Rwanda(RDF), qui est aussi un confident de longue date du Chef de l’Etat congolais, m’avait appelé quelques jours plutôt. Il avait insisté pour me persuader de prendre langue avec un émissaire de son ancien protégé de l’époque AFDL en vue de mettre fin aux hostilités en cours au Nord-Kivu. Le 29 décembre 2006, un hélicoptère militaire de l’armée rwandaise vint me chercher à mon QG de KIROLIRWE, pour aller négocier avec le Général John NUMBI, le 1er janvier 2007, un « processus de Mixage » avorté dans les conditions que l’on sait.
Ceci dit, le Rwanda est un pays voisin du mien, dont la langue nationale, la culture et la composition ethnique sont identiques à celles de ma Collectivité-Chefferie d’origine, le BWISHA. Avec lui, comme avec le Burundi, mon pays a partagé pendant 35 ans –de 1925 à 1960- un même passé colonial sous la dénomination de « Colonie du Congo Belge et du Ruanda-Urundi ». S’il n’y avait pas eu la colonisation, et donc la création de toute pièce, en Afrique, d’entités territoriales totalement nouvelles et artificielles, c’est sûr qu’il n’y aurait pas le Congo d’aujourd’hui. Mais, il y aurait toujours le Bwisha, province transvolcanique du Rwanda ancien. Par conséquent, les « Banyabwisha » ne seraient pas congolais, mais Banyarwanda, exactement comme avant la « Convention anglo-germano-belge de 1910 » relative aux frontières orientales du Congo Belge. Frontières intangibles conformément à la résolution de l’Union Africaine prise au Caire en 1964 ? Assurément. Car, pour ma part, j’y souscris sans réserve aucune. Pour autant, à l’inverse de certains de mes congénères qui vont jusqu’à dénaturer leurs patronymes afin de ne pas faire repérer leurs origines rwandaises, je n’éprouve aucun complexe face à cette proximité culturelle avec le Rwanda. Panafricaniste impénitent, j’en tire même une certaine fierté.
Ostracisme contre les Tutsi.
En réalité, que ce soit en RDC, en Afrique ou dans le monde, nombreux sont ceux qui connaissent parfaitement le niveau élevé d’ostracisme pratiqué depuis près de cinq décennies à l’égard de la communauté Tutsi congolaise. On le doit aussi bien à l’Etat qu’aux leaders des partis politiques ou des groupements ethniques congolais. Certes, depuis l’indépendance de notre pays, en 1960, le Tutsi congolais partage avec son homologue Hutu d’avoir été constamment contesté dans sa nationalité congolaise d’origine par appartenance. Mais, contrairement aux Hutu, les Tutsi vivent à l’intérieur d’un Congo dont pourtant ils font pleinement partie intégrante, un calvaire identitaire dû à leur seule particularité phénotypique. C’est dire qu’ils sont pointés du doigt pour quelque chose dont forcément ils ne sont pas responsables, qu’ils sont stigmatisés et discriminés, non pour ce qu’ils font, mais pour ce qu’ils sont ou pour ce dont on dit qu’ils sont.
En vertu de préjugés farfelus établis par des ethnographes coloniaux, son phénotype a fait du Tutsi, en général, un allochtone illégitime sur le sol des pays des Grands-Lacs. C’est pourquoi, en 1991, sieur Léon MUGESERA, un génocidaire rwandais de renom, aujourd’hui détenu au Tribunal Pénal International pour le Rwanda à ARUSHA, a pu s’écrier au cours d’un meeting du MRND, le parti de feu Juvénal HABYARIMANA dont il était un des dignitaires éminents : « Nous allons raccourcir les Tutsi et les renvoyer en Abyssinie, leur pays d’origine, par le chemin le plus court, celui de la rivière Nyabarongo (dont les eaux s’écoulent jusqu’en Ethiopie). C’est pourquoi aussi, nos voisins ethniques en RDC disent de nous : « ils ne sont pas bantous, ils ne peuvent donc être des nôtres». Pourtant, n’importe quel étudiant ayant fréquenté un établissement universitaire sérieux sait, dès ses tout premiers cours d’ethnologie à la faculté, qu’est bantou tout celui dont la langue maternelle est une langue bantoue. Or, jusqu’à preuve du contraire, le Kinyarwanda, la langue maternelle du Tutsi comme du Hutu, au Congo comme au Rwanda, est une langue bantoue.
La vérité est que le brin de racisme ou de xénophobie tapi au plus profond de chaque être humain murmure constamment à l’oreille du détracteur du Tutsi que celui-ci n’a que ce qu’il mérite. Parce qu’il n’avait qu’à n’être pas morphologiquement différent. S’il l’est, c’est qu’il n’est vraiment pas congolais et, en tant que tel, il ne dispose d’aucun droit au Congo, sauf celui de se taire, de se coucher, de ramper, de crever ou de partir. Exagération ? Voyez plutôt : en 1993, les statistiques annuelles publiées par le diocèse catholique de Goma –les plus fiables à cette époque où déjà l’Etat congolais et son administration s’enfonçaient irrémédiablement dans la déliquescence- indiquaient que les Tutsi du Nord-Kivu étaient au nombre d’environ 300.000, soit environ 10% de la population totale de la Province. Démographiquement, ils se rangeaient en 3ème position, après les Hutu et les Nande, ethnies majoritaires à hauteur de 40% chacune, mais loin devant les Kano, les Kumu, les Hunde, les Nyanga, les Tembo et les Twa. Or, depuis 1996, il n’y a pratiquement plus de Tutsi congolais au Nord-Kivu. Dans leur quasi-totalité, ils sont exilés ou réfugiés dans les pays voisins, principalement au Rwanda. Motif de cet exode massif : échapper aux terribles génocidaires rwandais ex-FAR/Interahamwe, aujourd’hui reconvertis en FDLR et installés dans notre pays comme en territoire conquis, depuis leur irruption massive, prédatrice et meurtrière, en juillet 1994. Les rares Tutsi –de véritables téméraires- qui sont restés ou sont rentrés au pays ont fini par se regrouper dans les seules parties du Territoire national où ils se sentent réellement en sécurité, celles sous contrôle du CNDP. Partout ailleurs, ils ont déserté villes, cités, agglomérations et campagnes, car ils n’ont cessé d’y être en butte, selon les endroits, aux exactions de la sécurité militaire, de l’auditorat militaire, de la garde présidentielle, des services de sécurité et d’immigration, de la police nationale, de l’administration territoriale et des groupes armés.
A longueur des journées, ils y étaient traqués ou rançonnés, pendant que, face aux FDLR ou à leur couverture congolaise, le PARECO, peu d’entre eux ont miraculeusement survécu. Aux barrières érigées par les FARDC ou par d’autres services de sécurité, les Tutsi sont les seuls qu’on fait descendre des véhicules, les seuls qui sont retenus ou dont on retient les pièces d’identité. Généralement, ils ne sont libérés ou ne récupèrent leurs documents que contre espèces sonnantes et trébuchantes. Ils paient, au propre comme au figuré, tantôt pour leur faciès, tantôt pour leur réussite économique supposée, tantôt encore pour leurs ambitions ou leurs sympathies politiques affichées ou prêtées. Par exemple, ces derniers mois à Goma, des enlèvements suivis de disparitions, d’assassinats ou de réapparitions inespérées ont jalonné la vie quotidienne de la communauté Tutsi. Dans cette ville, le danger est tel que plus aucun Tutsi n’ose y passer la nuit. Pour être à peu près sûrs qu’ils seront encore en vie le lendemain, tous préfèrent aller se mettre à l’abri à Gisenyi, la ville rwandaise jumelle de la capitale provinciale du Nord-Kivu.
Et le Gouvernement dit de la République n’a pas l’air de se sentir interpellé par une telle situation ou tout simplement n’en a cure. Sans doute parce qu’il escompte qu’une ville de Goma vidée de ses Tutsi le réconciliera avec les groupes ethniques hostiles de la Province. Dans le même temps, le Gouverneur de la Province a ordonné aux entreprises et aux services publics qui emploient des Tutsi de licencier quiconque osera braver l’interdiction de traverser la frontière pour passer la nuit de l’autre côté. Car, manifestement, le pouvoir qui sévit à Kinshasa –dont le Gouverneur PALUKU Jullien se veut le thuriféraire- verrait bien Goma devenir pour les Tutsi congolais une immense prison nocturne où l’on pourrait assassiner en silence, les rideaux tirés et les lumières éteintes. Si les choses devaient changer positivement au cours des prochaines semaines, ce ne sera pas le fait d’une soudaine bienveillance du pouvoir, mais bien de la dissuasion due à l’arrivée annoncée au Nord-Kivu d’un corps expéditionnaire rwandais dont on dit qu’il vient traquer les FDLR.
La guerre comme ultime recours.
Le Tutsi congolais est depuis longtemps victime d’agressions caractérisées et répétées alors que, par tempérament comme par tradition, il n’est ni rebelle ni militariste. Alors que, depuis le début de la colonisation jusqu’en 1996, il a eu toutes les raisons de se rebiffer. En effet, tout au long de cette période, il a été l’objet d’une violence unilatérale, soit du fait du pouvoir d’Etat, soit du fait des groupes politiques ou ethniques manipulés par le pouvoir d’Etat. Au Nord-Kivu, nous pourrions illustrer cette assertion par la destitution brutale, en 1919, pour « délit de tutsité », de NSHIZIRUNGU, Chef de la Chefferie de Jomba et accessoirement mon arrière-grand-père et de KABANGO, Chef de la Chefferie de Busanza dont la famille fut reléguée au Bas-Congo. On pourrait ensuite évoquer les différentes péripéties législatives par lesquelles, cinq décennies durant, la nationalité congolaise d’origine par appartenance a été constamment manipulée pour essayer de rendre étrangers ou apatrides les Tutsi congolais. Enfin, il y a la situation actuelle où tout un peuple est délibérément et cyniquement maintenu hors de la patrie malgré lui. Avant 1996, le Tutsi congolais était exclu aussi bien de l’armée que de la police, sauf à titre anecdotique. Le colonisateur avait estimé, en effet, qu’il n’en avait pas les aptitudes physiques et les gouvernements successifs du Congo indépendant avaient pris cette assertion pour argent comptant.
En 1996, la jeunesse Tutsi n’avait pris massivement les armes que parce que poussée vraiment à bout et qu’il s’agissait-là d’un ultime recours pour éviter à la communauté de disparaître en tant que groupement humain. Moi-même, avant de revêtir le treillis, dans les années 90, j’ai d’abord enseigné et prêché. J’ai longtemps tenu la craie en même temps que la bible. Ensuite, un jour de ces années noires, j’ai été contraint d’arracher littéralement un fusil des mains d’un militaire agresseur. Pour sauver ma peau ainsi que celle de mes élèves menacés de mort par des éléments de l’ancienne DSP de Mobutu déployés à Kitshanga où j’enseignais. Depuis, j’ai laissé tomber la craie et ne vais plus au tableau noir qu’épisodiquement –au training wing – mais j’ai gardé la bible et n’ai plus lâché le fusil. Pour défendre tous les miens : au sens nucléaire du terme, c’est sûr, au sens ethno-linguistique, c’est certain, au sens national absolument. D’ailleurs, nos camarades du CNDP issus d’autres ethnies partagent sans réserve la cause des Tutsi congolais. Parce qu’ils approuvent l’urgence et la nécessité de mettre en pratique cet adage ancestral qui incite l’épouse prévoyante « à balancer par de-là la palissade le bâton qui a servi à battre sa co-épouse ». Car, s’il est vrai que, du fait de tous les régimes passés et présent, les Tutsi congolais demeurent les souffre-douleur de la « maison RDC », demain n’importe quelle autre ethnie pourrait à son tour subir les exactions ou les omissions d’un pouvoir d’Etat devenu totalement irresponsable. Les Baluba-Kasaï du Katanga en savent quelque chose, les Hema et les Lendu en Ituri aussi, les ressortissants de l’Equateur ont reçu le coup de semonce avec l’agression contre Jean-Pierre BEMBA et les Bakongo qui payent indistinctement un lourd tribut à l’activisme du Bundu-dia-Kongo ne démentiront pas.
La cohésion nationale en danger.
C’est le contexte de toutes ces frustrations rentrées qui favorisa l’émergence du CNDP. Pour l’essentiel, sa branche armée était composée d’anciens soldats du RCD réfractaires à l’intégration de l’armée par le biais du brassage. Ceux-ci étaient interpellés par la situation dramatique qui maintenait leurs parents hors de la patrie malgré eux et n’offrait aucune perspective crédible de leur rapatriement prochain. Nous nous interrogions, en effet, sur cette incongruité constituée par notre présence sous le drapeau national, alors que nous n’étions même pas capables d’offrir la sécurité à nos propres proches délaissés par un pouvoir dont nous étions censés être le bras armé. Tout à coup, nous eûmes le sentiment d’être des mercenaires dans notre propre pays et en éprouvâmes un fort dégoût. Nous ne pouvions en aucun cas le supporter plus longtemps.
C’est pourquoi, en 2004, c’est-à-dire bien longtemps avant la fin de la Transition et bien avant la tenue des élections générales dans le pays, nous avions décidé secrètement de nous doter d’une organisation politico-militaire rendue publique seulement en 2006. Mais, dès décembre 2004, elle nous avait déjà permis d’enrayer, à KANYABAYONGA, l’offensive des forces gouvernementales –environ 10.000 hommes- dont le nom de code était « OPERATION BIMA ». Comme son nom le suggère et comme le détaillait l’ordre d’opérations, elle était destinée à défaire les troupes insurgées avant de chasser de la RDC les populations congolaises rwandophones, en premier lieu les Tutsi, et de les expédier « chez elles au Rwanda ». Heureusement, elle n’a réussi ni l’un ni l’autre, mais selon toutes les apparences, la rancune tenace du pouvoir n’est pas près de se dissiper, bien au contraire.
Dans ces conditions, de quel droit voudrait-on contraindre les Tutsi à s’accommoder, sans broncher, d’un pouvoir d’Etat qui les ignore, les opprime ou les donne en pâture aux autres congolais ? Pourquoi ces congolais devraient-ils faire allégeance à un Etat qui manifestement n’en est plus un, tant il les déshonore, tant son incurie dépasse tout entendement ? Nous nous limiterons à illustrer cette affirmation par les propos entendus au matin du 02 janvier 2009, sur RFI. Un député national congolais, par ailleurs ancien ministre des finances sous MOBUTU-KENGO, déclarait textuellement ceci : « dans la gestion de la chose publique, le Chef de l’Etat Joseph KABILA est un braconnier qui veut se faire passer pour un garde-chasse ». Déjà en juillet dernier, du haut de la tribune de l’Assemblée Nationale, le même comparait, à juste titre, l’Exécutif de notre pays à « une équipe sans capitaine dans laquelle chaque joueur invente son propre jeu ou à un orchestre sans chef au sein duquel chaque musicien improvise sa propre partition ». Il aurait pu ajouter que, dans la gestion de la crise de l’Est du pays, le Président de la République se proclame volontiers pompier, alors qu’il agit en véritable pyromane.
En effet, lorsqu’en novembre 2006, le Gouvernement a déclenché les hostilités contre le CNDP devenu mouvement insurrectionnel déclaré, il y avait en tout et pour tout au Nord-Kivu 30.000 déplacés internes. Il y en aurait aujourd’hui plus d’un million dans les seuls Territoires de Masisi, Nyiragongo et Rutshuru. Comment en est-on arrivé là ? Par la faute de Joseph KABILA en personne. Recourant aux services d’un trio politicailleur local composé de SERUFULI Eugène-SENINGA Robert-SEBUJANGWE Bertin, par ailleurs fondateurs de la branche hutu de la milice PARECO, le Chef de l’Etat se mit à remplir les camps des déplacés par fournées entières. La méthode était simplissime : le trio sollicite de l’argent au Président de la République contre promesse de lui apporter la tête de NKUNDA sur un plateau au terme d’une opération militaire éclair. Celle-ci impliquerait leur propre milice, le PARECO, mais aussi les FDLR et les FARDC. Au sein de l’armée gouvernementale, il serait fait recours spécialement aux bataillons composés majoritairement de Hutu ou sous commandement d’officiers rwandophones, tels les RUGAYI, KAMANZI, HESHIMA et consorts, tous anciens du CNDP censés connaître ses méthodes de combat. Le trio envoie ensuite des messagers auprès des populations civiles pour les inviter à fuir le déluge de feu que le Gouvernement s’apprête à déverser sur la rébellion. « Mettez-vous à l’abri dans les camps situés en zones gouvernementales, leur disaient les messagers du trio, juste pour 15 jours, le temps nécessaire à régler son compte à NKUNDA ». Mais, à quatre reprises, ce fut la débâcle de la coalition. C’était, néanmoins, suffisant pour saturer les camps avec des millions de gens innocents, pour donner du travail à des humanitaires au chômage dans leurs pays respectifs et pour redorer le blason terni d’un président pyromane aux dépens d’une insurrection cyniquement et injustement accusée de tous les péchés d’Israël.
Faillite du pouvoir dans la gestion du pays.
La RDC est plongée dans un état de faillite générale à cause du leadership incompétent de Monsieur Joseph KABILA KABANGE, Président de la République, Chef de l’Etat et Commandant Suprême des Forces Armées. Son absence de vision et d’ambition pour son pays autrement que par l’incantation a fini par faire de lui l’héritier direct et consentant de l’Accord bâclée de SUN CITY, mais aussi de la Transition chaotique qui en fut l’émanation. Comme la plupart des congolais aujourd’hui, le député cité plus haut avait la nette certitude que la cacophonie était la règle au sommet de l’Etat. Et bien entendu rien n’a changé, rien ne va changer, malgré le changement à la Primature. En effet, sous l’autorité constitutionnelle de Joseph KABILA, la seule différence entre l’ancien et le nouveau Premier Ministre, entre l’oncle maternel et le neveu, c’est l’âge. Pour le reste, « KABILA-MUZITO, ce sera KABILA-GIZENGA » sans GIZENGA : la même procédure anticonstitutionnelle de nomination, en violation de l’article 78 de la loi suprême, la même atonie, la même incurie et la même incompétence dans l’exercice du pouvoir, la même irresponsabilité dans la gestion de la crise qui secoue l’Est du pays, une aptitude à la prédation plus affirmée, car MUZITO était Ministre du Budget de GIZENGA. Or, selon le propre audit de la Primature, sous son mandat un milliard trois cents millions de dollars américains, soit la moitié du budget national, ont été détournés durant l’exercice budgétaire 2007.
Par conséquent, il est indispensable de comprendre que si le CNDP a commencé sa lutte en mettant en exergue la cause des Tutsi congolais, c’est pour cette raison bien simple : l’exclusion qui vise en particulier cette composante parmi les plus minoritaires de la communauté nationale congolaise est emblématique de la faillite générale du pouvoir d’Etat dans notre pays. Car, sous prétexte d’être issu des urnes, avec le quitus d’une communauté internationale complice, ce pouvoir croit que tout lui est permis, qu’il n’est comptable de rien ni devant personne, que sa légitimité électorale est un chèque en blanc qu’il peut remplir à volonté. Même quand il s’abstient délibérément ou qu’il se montre incapable d’assumer, à l’égard de la nation, la première de ses tâches régaliennes, en l’occurrence assurer l’unité du peuple congolais dans la diversité de ses composantes ethniques. Le CNDP veut joindre ses efforts à ceux de toutes les congolaises et de tous les congolais décidés à restaurer la dignité perdue de leur peuple et de leur pays. Des congolaises et des congolais avides de placer la RDC au premier rang sur la scène continentale et de lui redonner le rôle de moteur et de phare de l’Afrique que lui destinait Patrice-Emery LUMUMBA, un rôle qui n’aurait jamais dû cesser d’être le sien tout au long de ses 48 ans d’indépendance.
Pour contrer l’argument de l’exclusion des Tutsi congolais, leurs détracteurs ont toujours un réflexe quasi-irrépressible : celui de leur opposer la présence au sein des FARDC d’un certain nombre d’Officiers généraux et supérieurs ou de quelques dignitaires Tutsi égarés au sein des institutions pour affirmer que les Tutsi congolais n’ont aucune raison de se plaindre. Mais, dans le même temps, ils crient à l’infiltration de l’Etat par des taupes étrangères au service du Rwanda. Nous ferons remarquer d’abord que ces généraux, colonels et autres majors sont en poste au sein de l’armée, non pas à la suite d’un recrutement civique, comme le voudrait la règle, mais d’un accord passé au terme d’une rébellion armée. Cet accord de SUN-CITY, dit « global et inclusif », a été négocié dans la seule perspective du positionnement individuel. Ce qui a permis aux chefs politiques et militaires de satisfaire des ambitions dérisoires.
Sans regarder en arrière, ceux du RCD se sont précipités à KINSHASA pour prendre leur part du gâteau concocté en Afrique du Sud. Aucun souci du sort des soldats, des cadres politiques et des militants qui les avaient portés au pouvoir, aucune préoccupation ni de l’implantation ni de l’animation des structures du Mouvement à la base en vue de la compétition démocratique à venir. Ils avaient foncé tête baissée vers les délices du pouvoir kinois, en laissant derrière eux des hommes et des femmes désemparés, comme des brebis sans berger. La sanction n’allait d’ailleurs pas tarder : 1,6% à la dernière élection présidentielle et une insignifiante présence au sein du Parlement, sans commune mesure avec l’énorme étendue du territoire qu’ils avaient administré pendant la rébellion qui aura duré 5 ans. Ont-ils vraiment raison ceux qui me reprochent d’avoir refusé de me rendre complice d’une telle irresponsabilité ? Au demeurant, la présence de tous ces personnages au sein du pouvoir d’Etat ne rime à rien, puisque depuis leur entrée en fonction en 2003, et malgré des titres ronflants, jamais ils ne se sont trouvés en situation de peser sur le cours des événements. Ils sont réduits à la condition peu enviable de simples faire-valoir. Leur présence est utilisée pour camoufler tous les autres torts faits à la communauté Tutsi dont ils sont issus.
Les conditions d’une paix durable.
La naissance du CNDP constitue donc une réponse directe à l’accord de SUN CITY qui, par un certain nombre de ses omissions, s’apparente à une trahison. En effet, le Dialogue Intercongolais de SUN CITY a eu pour principal résultat de régler le sort des individus –par leur positionnement politique- alors qu’étaient passés par pertes et profits les problèmes fondamentaux du pays. Si nos représentants négocient ces jours-ci à Nairobi avec le Gouvernement de Kinshasa, sous la médiation des Nations Unies, de l’Union Africaine et de la Conférence Internationale pour les Grands Lacs, c’est essentiellement pour remédier aux omissions de Sun City. Demain, 16 janvier 2009, il sera procédé à la signature, dans la capitale kenyane, d’une « Déclaration de Cessation des hostilités » qui permettra d’entrer dans le vif du sujet en vue d’établir les conditions d’une paix durable à l’Est de notre pays.Ainsi, au cours des rounds suivants, il sera remis sur le tapis le règlement des questions que Sun City avait inconsidérément renvoyées aux calendes grecques, à savoir :
– la réconciliation et la cohabitation pacifique entre les ethnies de l’Est de la RDC en vue d’instaurer et de consolider la cohésion nationale;
– la protection institutionnalisée des minorités ethniques particulièrement en danger;
– l’éradication de la présence dans notre pays des groupes armés étrangers, en particulier des génocidaires rwandais FDLR/ex-FAR/Interahamwe coupables, non seulement de pillages, de viols, de meurtres à grande échelle et d’actes de génocide, mais aussi de violation de notre souveraineté nationale et de l’intégrité de notre Territoire par la prise de contrôle, au détriment de l’Etat congolais, des pans entiers de la RDC ;
– la réinstallation des déplacés internes;
– la mise en œuvre du retour des réfugiés et des exilés congolais;
– la formation d’une armée nationale et des services de sécurité dignes de ce nom, c’est-à-dire ayant vocation et mission de sécuriser tous les congolais indistinctement;
– une gestion territoriale de type fédéraliste qui constitue une demande permanente de tous les congolais depuis près de 50 ans aux fins de rapprocher au maximum les gouvernants des gouvernés et de mieux partager les responsabilités;
– une répartition des ressources financières qui contienne dans des limites raisonnables la boulimie insatiable du pouvoir central et priorise les besoins définis et exécutés par les entités fédérées, en particulier le développement des infrastructures de base, et qui profite avant tout aux congolais les plus démunis.
Conclusion.
La tâche est titanesque, au regard de l’état de délabrement avancé dans lequel se trouve la RDC. Mais, 5 ans de maquis au sein du CNDP et, pour les plus endurcis d’entre nous, au moins 17 ans de lutte armée nous ont préparés à l’ouvrage. Quoiqu’il arrive et quoiqu’il en coûte, nous irons droit au but, sans tergiverser. C’est le mandat qui a été confié au leadership du Mouvement, lors du Congrès qui s’est tenu au QG de Bwiza, du 30 septembre au 1er octobre 2008. D’autant plus que, l’organe suprême du Mouvement en est venu à la conclusion que le pouvoir kabiliste conduit le pays tout droit dans le mur et que le temps est venu de lui demander des comptes. Attendre les échéances prévues en 2011, selon l’argument du pouvoir, c’est prendre le risque de compromettre le destin du pays pour toujours. Sous prétexte qu’il est seul à avoir été engagé pour les transporter, les passagers d’un bus devraient-ils laisser foncer droit dans le lac ou dans le ravin le conducteur devenu tétanisé, alors qu’ils ont les moyens de lui prendre le volant ? De même, pourquoi doit-on demander aux Congolais d’accepter un suicide collectif en tolérant un pouvoir désastreux dont ils voient bien qu’il les mène irrémédiablement à leur perte ? Deux ans sur une mandature de cinq, c’est assez pour juger d’un bilan. Or, dans tous les domaines de la vie nationale, on a beau chercher un seul secteur qui plaide en faveur du maintien au pouvoir du régime kabiliste, un seul qui puisse lui valoir le bénéfice du doute, on n’en voit aucun. Tout concourt à le déclarer en faillite définitive. Il lui reste la possibilité de choisir les conditions de sa liquidation : en douceur entre les mains d’un Curateur constitutionnel, de préférence. Ou, à défaut, de manière plus mouvementée entre les mains d’un peuple à bout de patience et décidé à reprendre, par tous les moyens, ses droits de souverain prima
Fait à Jomba-Chyanzu, le 15 janvier 2009.
P.S. : Cet article a été achevé une semaine avant l’arrestation de l’auteur à Gisenyi, dans des conditions qui relèvent de la trahison, car on ne met pas la main sur son invité. Il a été découvert dans ses affaires personnelles par sa famille. A l’occasion du refoulement des réfugiés Tutsi banyamulenge revenus du Burundi par les services de l’Etat congolais établis à Uvira, ses compagnons de lutte ont décidé de le rendre public pour que les congolaises et les congolais soient juges (Nord-Kivu, le 20 septembre 2009).