RDC- Kahemba : le grand flou.

Kenge Mukengeshayi

15/03/07

angola.jpgLa délégation angolaise aurait réussi à faire passer le point de vue de Luanda. Le communiqué conjoint final de la rencontre de Kinshasa contredit les députés du Kwango :la frontière n’a pas été modifiée.

Une forte délégation angolaise a séjourné ce mardi à Kinshasa pour des discussions de très haut niveau avec la partie congolaise. Conduite par le ministre angolais des Relations extérieures, cette délégation comprenait, en outre, le ministre de l’Intérieur, le chef d’Etat-major général des Forces armées angolaises, le chef des renseignements militaires, le commandant de la police nationale ainsi que son collègue de la police des frontières.

La délégation angolaise était porteuse d’un message du président Edouardo Dos Santos relative à la situation qui prévaut dans le territoire de Kahemba, province du Bandundu, littéralement occupé par des éléments de l’armée angolaise, à en croire plusieurs témoignages des habitants. La partie congolaise, pour sa part, était conduite par le ministre des Affaires Etrangères, Antipas Mbusa Nyamuisi.

Si l’on en croit les indiscrétions glanées dans les milieux proches de la délégation angolaise, l’importance de celle-ci soulignait l’intérêt que Luanda accorde à la question de Kahemba ainsi que le style vigoureux que Luanda entendait imprimer aux discussions avec la partie congolaise.

On estimait en effet à Luanda que la tâche serait d’autant plus facile que les officiels congolais ont d’eux-mêmes adopté une attitude réservée sinon embarrassée. Mezza voce, on se félicitait dans la capitale angolaise du fait que la seule déclaration réellement claironnée du côté congolais ne l’a été que par des députés du Kwango, ce qui est loin de faire de Kahemba une cause nationale comme le fut il y a trois ans Bukavu prise d’assaut par des officiers Laurent Nkunda et Jules Mutebusi.

Seul officiel à s’être plus ou moins exprimé sur la question, le ministre de l’Intérieur Denis Kalume n’a ni confirmé ni infirmé l’occupation de Kahemba. Il a préféré demander aux Congolais d’attendre le résultat des « concertations » avec la partie angolaise tout en les invitant à s’informer à la bonne source. Une façon bien élégante de dire que les députés du Kwango qui se sont prononcés sur la question n’étaient pas la bonne source.

Les analystes à Kinshasa relevaient pour leur part plusieurs faits troublants qui rendaient la négociation fondamentalement biaisée. D’abord le fait de l’occupation de 11 villages congolais, confirmée par les députés du Kwango. Ensuite, le profil bas adopté par les officiels de la RDC. Enfin, la position angolaise selon laquelle les forces de sécurité de Luanda n’avaient pas traversé la frontière.

Ambiguïté

Justement, le communiqué final rendu public par la partie angolaise à l’issue de la rencontre du 13 mars à Kinshasa n’a malheureusement pas permis de lever l’équivoque. D’entrée de jeu, l’Angolais Joao Barnando de Miranda avait clairement indiqué que la police angolaise n’avait pas franchi la frontière. Il mettait ainsi au défi tous les Congolais ainsi que les députés du Kwango qui ont émis un avis contraire, estimant qu’au moins 11 villages congolais étaient sous occupation.

Heureusement pour lui, le communiqué final est allé encore plus loin en relayant le point de vue angolais. Ainsi, sur le fond de la question, « les deux délégations ont conclu qu’il n’y a pas eu une quelconque modification dans la frontière commune et ont réaffirmé leur engagement à l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation ». Question : la frontière avec la présence de la police angolaise dans les 11 villages concernés, la RDC ayant subtilement fait don ou abandon d’une partie de son territoire, ou telle que la revendiquent les députés du Kwango et la population de Kahemba ?

L’équivoque, faut-il le relever, n’a pas été levée. D’autant moins que « la réunion a décidé de créer une équipe technique bilatérale avec l’objectif d’identifier les 112 bornes de frontière qui délimitent les deux pays ».


Le Phare

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