AFP
13/06/08
LA HAYE – Les juges de la Cour pénale internationale (CPI) ont convoqué une audience mardi 24 juin afin de "prendre sous considération la libération" du milicien congolais Thomas Lubanga Dyilo, accusé d'enrôlement forcé d'enfants soldats, et dont le procès a été reporté mercredi.
Dans une décision de 44 pages, les juges de La Haye écrivent qu'une "suspension dans la procédure s'impose (…) dans ces circonstances, une audience doit avoir lieu mardi 24 juin à 14HOO (12HOO GMT) afin de prendre sous considération la libération de l'accusé".
Mercredi, ils avaient indiqué dans une décision orale la suspension du procès de Thomas Lubanga, 47 ans, le premier accusé de la CPI à répondre de crimes de guerre pour son rôle dans la guerre civile ayant ravagé l'Ituri, une région de l'est de la République démocratique du Congo (RDC).
Le procureur avait l'intention de présenter des preuves potentiellement disculpatoires, obtenues en protégeant ses sources, notamment des agents des Nations Unies en RDC, et qui ne pouvaient donc, selon l'accusation, être transmises à la défense, ont expliqué les juges.
Or ceci "neutralise les opportunités qu'aurait eues l'accusé à préparer sa défense" et bafoue son "droit à un procès juste", selon leur décision.
En tant que chef de l'Union des patriotes congolais (UPC), Thomas Lubanga a supervisé et organisé, selon l'accusation, l'enrôlement forcé d'enfants au sein des Forces patriotiques pour la libération du Congo (FPLC), l'aile militaire de l'UPC, entre 2002 et 2003.
Selon les ONG humanitaires, les affrontements interethniques et les violences entre milices en Ituri, pour le contrôle notamment de ses mines d'or, auraient fait 60.000 victimes depuis 1999.
Mardi, le procureur avait indiqué aux juges qu'il restait 156 documents, obtenus des Nations unies sous restrictions, et d'ONG humanitaires, qu'il n'avait pas le droit de transmettre à l'équipe de défense.
Ceux-ci pourraient permettre de constater que l'accusé "souffrait de troubles mentaux", qu'il "avait été intoxiqué" et qu'il lui "manquait donc toute capacité de contrôle de sa conduite, ou de compréhension de l'illégalité de celle-ci", selon les juges.
Ils pourraient également permettre de constater que Thomas Lubanga avait agi "par auto-défense" ou qu'"il avait fait des efforts pour démobiliser des enfants-soldats", selon la décision.
Lubanga aurait également eu un "commandement insuffisant" sur ses troupes, qui ont commis les crimes, et l'UPC et son aile militaire "étaient sous le contrôle de l'Ouganda, du Rwanda et d'autres pays", selon certains de ses documents.
Certains d'entre eux "avaient le potentiel" d'"impacter matériellement sur la détermination de la culpabilité ou de l'innocence de l'accusé", expliquent les juges, tout en indiquant qu'ils ont ordonné la suspension des procédures "avec une grande répugnance".
"Les juges ont une conscience très nette qu'en suspendant ces procédures, les victimes ont, en ce sens, été exclues de la justice", estiment-ils, tout en laissant au procureur l'opportunité de faire appel de leur décision.
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