Kasongo M.
25/01/08
Dès sa conception, la Cour Pénale Internationale, CPI, n'a pas cessé de susciter polémique et scepticisme. Il faut rappeler qu’elle est un chef-d’œuvre d’un vaste réseau d’ONGs qui vivent en vrais parasites des conflits provoqués par la globalisation. Par ailleurs, il convient de noter que la CPI a été conçue avec l’objectif de substituer dans un délai plus ou moins court le Tribunal International pour la Yougoslavie et celui qui a été créé pour le Rwanda. Au lieu de rapatrier le processus judiciaire au niveau national de chaque pays, ce réseau d’ONGs a voulu éloigner encore plus la procédure aussi bien des victimes que des Etats responsables pour la protection des droits de leurs citoyens. Le scepticisme envers la CPI se reflète surtout dans le refus de certains pays-clés de ratifier le Statut de Rome portant sa création. Les pays ayant refusé de ratifier ne sont pas des moindres, on y compte notamment la Chine, les Etats-Unis d'Amérique, et la Russie, Israël ainsi que des pays Africains et autres.
En général l'objection majeure avancée par ces pays c’est la crainte de voir la cour servir à des fins politiques plutôt que rendre une justice objective. Au nom de la souveraineté nationale et par respect pour leurs propres systèmes judiciaires, ces pays prônent, pour que chacun de leurs citoyens accusés de crimes, bénéficie des poursuites judiciaires justes et respectueuses de leurs droits dans leur propre pays. La question de l'instrumentalisation de la justice internationale pour des raisons politiques constitue donc la faiblesse intrinsèque de cette juridiction, depuis le début et demeure d'actualité aujourd'hui. Ceci est particulièrement vrai dans le cas de la République Démocratique du Congo, RDC. Jusqu’à présent, à part le libérien Charles Taylor, seuls les citoyens rdcongolais ont été transférés à la Haye. En effet, lorsqu’on observe l'utilisation de la CPI pour la situation en RDC, l'on doit constater que le choix de l’Ituri, pour entamer les premières poursuites indique clairement la volonté d'instrumentalisation politique ou politisation, des possibilités de poursuites devant la CPI.
Les Ituriens ont été les premiers à observer la partialité de la procédure. Très vite des voix se sont élevées, à travers de nombreux écrits adressés au Gouvernement, à la Communauté Internationale ainsi qu'à la CPI elle-même, pour dénoncer le caractère ethniciste de la procédure ainsi que le fait que l'on se limitait à poursuivre les « petits poissons », les « gros poissons », c’est-à-dire les véritables responsables politiques du conflit meurtrier en Ituri, restant totalement à l'abri. Plus précisément, le recours à la CPI a été engagé dans un contexte politique où l'on a vu une certaine coalition militaire sur terrain du RCD-KML, des FARDC, de l'Opération ARTEMIS suivi de la MONUC, contre la rébellion de l'UPC. En d’autres termes le recours à la CPI a été utilisé par la coalition sur fond ethnique. Ainsi, longtemps tous les Ituriens en particulier ceux de l'ethnie Hema ont déploré les poursuites engagées à la CPI contre des Hemas et Tutsis uniquement, en
l'occurrence Thomas Lubanga, Bosco Ntaganda, entre autres. Dès lors l’instrumentalisation politique visant tous ceux qui étaient considérés comme opposition au Gouvernement devenait claire. Surtout si l’on considère que par la même occasion le Gouvernement réussissait à mettre à l’abri des poursuites ses propres officiers et leurs alliés (il faut se rappeler que la CPI n’a pas de compétence pour poursuivre un gouvernement ou un Etat). Les accusations de plus en plus gênantes contre la partialité de la CPI l'ont conduites en 2007 à tenter de démontrer une rectification du tir par l'ouverture du dossier contre Germain Katanga.
La défaillance demeure, de toute manière, en ce sens que la CPI n'a toujours pas réussi à convaincre les Congolais, ni de son impartialité, ni de sa poursuite d'une réelle justice. Elle semble, tout en essayant de couvrir cette réalité, se soumettre à une pression politique et réduit son activité à poursuivre les opposants réels ou supposés du Gouvernement de Kinshasa. Et pour l’instant les noms qui reviennent dans les rapports de cette cour et des ONGs qui la supportent sont des noms d'origine Hema ou Tutsi. Seules ces deux ethnies se trouvent dans sa ligne de mire. De plus, les « gros poissons », (mentionner quelques noms ici avec un notamment…) que ce soit en Ituri ou ailleurs dans le pays, continuent à être à l'abri des poursuites de la CPI, souvent couverts d'une immunité, à la faveur de la politique, qui semble arranger tout aussi bien le pouvoir à Kinshasa que ses parrains de la communauté internationale.
Les Congolais qui ne sont pas dupes continuent, eux, à attendre de la Communauté Internationale et de la CPI en particulier qu'ils démontrent une réelle volonté de ramener la justice en RDC. Mais ils ne se font pas d’illusion car, en effet, tant que la CPI n'aura pas la force de résister à des pressions politiques et prouvera qu'il s'agit là d'un instrument de justice impartial et équitable, la CPI en RDC donnera raison à ses pays détracteurs, et c'est l'idée même d'une justice internationale qui en pâtira. Il est difficile de terminer cette interrogation sur le réalisme d'une justice internationale impartiale et équitable, sans relever le fait la CPI, pour le moment, semble à ce jour avoir été créé non pour faire la justice à travers le monde, mais
pour se transformer en justicier au service de quelque pouvoir…en Afrique !
A moins de changer son nom en Cour Pénale Politique pour les Africains, la CPI est encore à des années lumières de démontrer aux Congolais, aux Africains et au monde entier sa raison d’être. Ainsi, la CPI est désormais invitée à d'une part rendre justice aux Congolais en poursuivant les « gros poissons » ayant bénéficié jusqu'ici d'une impunité totale, et d'autre part à ouvrir des dossiers en dehors de l'Afrique, c'est-à-dire en Europe, en Asie, au Moyen Orient, en Amérique Latine.