Impassible aux troubles dans le Bas-Congo, en Ituri, à Minembwe: Où est passé le «gouvernement» ?

 Freddy Monsa Iyaka Duku

3/02/07

Le ministre belge de la Coopération devait séjourner une semaine en République démocratique du Congo. Devant l’absence d’un «gouvernement», il n’est resté que 48 heures. La province du Bas-Congo a, pour sa part, été en ébullition pendant 48 heures, enregistrant de nombreuses victimes. Situation analogue en Ituri et à Minembwe. Aucune réunion du gouvernement. Pas de déclaration officielle. C’est comme si les troubles à l’ordre public étaient chose normale. C’est inquiétant.

Graves sont les derniers événements tragiques qui viennent de se dérouler dans la province du Bas-Congo. Quelle que soit la version des uns et des autres, il y a eu mort d’hommes avec risque d’influer négativement sur le processus politique en République démocratique du Congo.

Mais bien avant le drame du Bas-Congo, des combats ont éclaté en Ituri, particulièrement à Fataki. Mais également à Minembwe, dans la province du Sud-Kivu. Dans tous ces cas, l’ordre public a été perturbé, défiant par là même l’autorité de l’Etat.

Ce sont des événements d’une extrême gravité qui appelaient la réaction du gouvernement. Réaction que la population peut apprécier à sa juste valeur. Certes, le ministre de l’Intérieur s’est rendu aussitôt au Bas-Congo, comme il avait fait auparavant à Bolobo, dans la province du Bandundu, et à Sake, près de Goma. Une délégation mixte d’officiers FARDC-Monuc s’est rendue à Minembwe en vue de se rendre compte de la situation exacte dans ce coin.

C’est bien beau. Mais la gravité de la situation exige plus. Une réunion du cabinet de crise aurait été une excellente initiative. Elle aurait constitué un acte hautement responsable devant l’opinion nationale et internationale. En effet, ladite réunion devait être sanctionnée par une déclaration officielle sur la chronologie des faits, les dispositions prises en vue de rassurer le peuple congolais sur la volonté politique ainsi que la détermination du gouvernement de ne tolérer aucun acte affectant l’ordre public et la sécurité intérieure de l’Etat.

UN IMMOBILISME PREJUDICIABLE

Pour ne prendre que le cas de la province du Bas-Congo, le ministre de l’Intérieur s’est rendu sur place. Il a usé de son autorité, de sa diplomatie pour ramener le calme, quoique la situation reste tendue.

Mais à qui a-t-il fait son rapport en dehors du président de la République ? La gestion classique des affaires de l’Etat voudrait que cette situation soit présentée au Conseil des ministres. A la connaissance de la population, rien n’a été fait dans ce sens dans la mesure où le gouvernement, même assumant les affaires courantes, ne se réunit plus. Ses membres ont la tête dans les nuages.

Par ailleurs, les derniers soubresauts au pays exigent la réponse immédiate des responsables de la Défense et de la Sécurité. Le vice-président de la République assumant les affaires courantes de cette commission a plus parlé en tant que ressortissant de Minembwe et président national du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD).

On n’a enregistré aucune réaction du ministre de la Défense. Par contre, c’est l’Etat-major général des FARDC qui donne l’impression d’avoir pris les choses en mains. Une telle approche de la gestion des affaires de l’Etat comporte beaucoup de risques dans l’interprétation des faits et des ordres à donner. Elle conduit souvent à la confusion et à la neutralisation respective des autorités.

Plus grave, les ministres sont tombés dans un certain immobilisme au regard de la dernière lettre du directeur de cabinet du chef de l’Etat les instruisant d’assumer les affaires «courantes» sans engager l’Etat. C’est l’une des raisons pour laquelle le ministre belge de la Coopération a écourté son voyage dans la mesure où il n’avait pas en face des interlocuteurs plénipotentiaires.

La situation est vraiment préjudiciable, car entre le gouvernement assumant les affaires courantes et un gouvernement toujours attendu, il y a un vide. Tout semble s’être arrêté. Or, des situations aussi graves que celles qui prévalent au pays ne méritent pas un traitement à la dérobée. En catimini. Les décisions doivent être portées à la connaissance du public. Cela lui permettrait de juger le sens de responsabilité du gouvernement. Ou de savoir qu’il existe un gouvernement qui se préoccupe de la sécurité collective.

PREMIER MINISTRE SANS MINISTRES

L’immobilisme dénoncé plus haut s’aggrave dès lors que le Premier ministre nommé n’a pas encore formé son gouvernement. Il n’a ministre ni vice-ministre. Les ministres expédiant les affaires courantes ne répondent pas de lui. Seul, il ne peut convoquer aucun cabinet de crise. Donc, il ne peut prendre aucune décision. Pour preuve, il s’est réservé de recevoir les personnalités étrangères en séjour à Kinshasa. Et pourtant, la situation est grave et engage l’Etat dans le sens large du terme.

Une fois de plus, il est temps, dans le camp de la majorité présidentielle, de contribuer à la formation du gouvernement de la 3ème République. Il est urgent de rendre publique l’équipe de l’Exécutif. Non pas seulement parce que la sécurité intérieure du pays semble menacée, mais aussi parce qu’au plan des rapports avec les partenaires externes, la RDC ne peut prolonger indéfiniment «la récréation» pour régler les ambitions démesurées des alliés au sein de l’AMP.

Le sort de la République démocratique du Congo se joue en ce moment. Toute mauvaise analyse de la situation présente, avec des yeux intéressés, poserait un jalon défectueux sur la route de la 3ème République.

Aussi Le Potentiel invite-t-il le Sénat, qui sera mis en place ce samedi 3 février, et l’Assemblée nationale, déjà à pied d’œuvre, à se saisir, toutes affaires cessantes, de ces drames, aggravés par l’absence du gouvernement et l’immobilisme subséquent.

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