Dépêche AFP
30/10/07
Le Nord-Kivu, province de l'est de la République démocratique du Congo (RDC), est plongé dans une "très grave crise humanitaire", "comparable à celle du Darfour", s'est alarmé lundi soir le représentant spécial de l'Union européenne (UE) pour la région des Grands Lacs africains.
"La crise humanitaire au Nord-Kivu a atteint un niveau comparable à celle du Darfour", région de l'ouest du Soudan en proie à la guerre depuis février 2003, a déclaré Roeland Van de Geer lors d'un entretien à l'AFP à Kinshasa, au terme d'une visite de 13 jours en RDC.
"Nous avons été frappés par la gravité de la crise humanitaire au Nord-Kivu. Il y a urgence à régler cette crise et à s'attaquer à ses causes profondes", liées à la persistance des violences dans cette région, où 350.000 personnes ont fui leurs foyers depuis le début de l'année.
Le Nord-Kivu, théâtre depuis la fin août d'affrontements entre l'armée régulière et des soldats insurgés ralliés à l'ex-général tutsi congolais Laurent Nkunda, compte près de 800.000 déplacés internes, soit 70% du nombre total de déplacés de guerre en RDC.
Selon l'ONU, quelque 236.000 réfugiés du Darfour se trouvent au Tchad, tandis que 173.000 Tchadiens ont été déplacés par les violences dans l'est de leur pays.
"Dans trois (des six) camps de déplacés de Mungunga (à 15 km au nord-ouest de la capitale provinciale Goma), les responsables des camps se sont plaints des viols des femmes, dans les camps ou à l'extérieur, lorsqu'elles vont chercher de l'eau ou du bois", a déclaré M. Van de Geer.
"Les déplacés mettent en cause les FARDC (Forces armées congolaises), qui sont autour des camps et y pénètrent parfois de nuit", a-t-il poursuivi.
Selon les agences humanitaires opérant au Nord-Kivu, la zone de Mugunga compte à elle seule plus de 60.000 déplacés, hébergés dans des camps ou des familles d'accueil, dans une promiscuité terrible, favorisant le développement de maladies comme le choléra, et alimentant les tensions entre déplacés. Au moins 38 cas de viols ont été recensés dans les différents camps de cette zone.
De nombreux autres déplacés ne sont pas accessibles aux humanitaires dans les territoires de Masisi et de Rutshuru (nord-ouest et nord de Goma), deux territoires où le bureau des Affaires humanitaires de l'ONU (Ocha) estime qu'un habitant sur trois est actuellement déplacé.
"Nous devons rester engagés au côté du gouvernement congolais pour régler cette crise humanitaire, mais aussi pour résoudre la crise sécuritaire et aider le pays à se développer, en associant les pays de la région des Grands Lacs", a plaidé M. Van de Geer.
Il a appelé à régler de "façon conjointe le cas des (rebelles hutus rwandais des) FDLR et le cas de Nkunda".
Ex-officier tutsi congolais, Nkunda se pose en défenseur de sa communauté contre les FDLR, dont certains ont participé au génocide rwandais de 1994, essentiellement dirigé contre la minorité tutsie.
Nkunda accuse l'armée régulière d'être appuyée sur le terrain par ces rebelles hutus, ce que Kinshasa dément formellement.
"L'urgence et la priorité est la crise humanitaire, mais il faut absolument en même temps, si on veut trouver une solution durable à cette crise, s'attaquer à la réforme du secteur de la sécurité en RDC", a souligné le représentant spécial.
Agence France Presse