Le dernier développement de la situation politique et sécuritaire en République Démocratique du Congo en général et plus particulièrement dans le territoire de Beni en province du Nord- Kivu est effrayant. La série des massacres des populations civiles à échelle évasée dont les plus récents remontent à la nuit du 20 au 21 novembre 2014 dans les Villages de Tepoimba et Vemba à 10 km de Mavivi/Beni avec son lot de centaine des victimes innocentes atrocement
achevées à la machette, au couteau et autres gourdins, reste sans appel. 236 innocents dont des femmes et des enfants massacrés en l’espace de 90 jours est un drame incompréhensible et sensé inattendu depuis que la Brigade d’Intervention des Nations-Nations a vu le jour dans notre pays et, surtout, après que les Forces Armées de laRépublique Démocratique du Congo
aient été déclarées monter en puissance et contrôler pleinement l’ensemble du territoire national (Cfr. Intervention du Chef de l’Etat à la 69eme session de l’Assemblée générale des Nations unies le 25 septembre 2014). Les dirigeants du pays doivent une minutieuse explication non seulement aux familles de victimes mais également à l’ensemble de la communauté nationale.
La thèse à développer par le Gouvernement de la République devra
être en mesure de :
1. Concilier, d’une part, les faits actuels qui démontrent que les
assaillants portent la tenue de l’armée régulière et séjournent pendant des longues heures sur les lieux de leurs forfaits avant de s’en retirer en toute quiétude pour une destination inconnue; et, de l’autre, les propos du gouvernement : «qu’après le succès des opérations SOKOLA II, ces rebelles ADF étaient déjà neutralisés et leurs éléments résiduels en cavale étaient forcés de se délocaliser au delà de la Rivière SEMULIKI soit à plus de 150 km de leurs anciennes positions ». (cfr. point de presse du Ministre de la Communication et Médias Lambert Mende). Ces
deux assertions ne peuvent coexister sans que l’une ne soit une contre-vérité;
2. Justifier la disproportion des moyens dans la réaction du Gouvernement contre les groupes armés selon qu’il s’agit de mouvements de revendications citoyennes ou de ceux qui ciblent les populations civiles. Car, en effet, le gouvernement recoure à des couteux moyens politiques, militaires et diplomatiques pour réprimer des mouvements de revendications citoyennes pendant qu’il se révèle complaisant et hésitant contre des groupes armés qui prennent
pour cible la population civile.
3. Démontrer qu’il ne s’agit aucunement d’une stratégie politique
savamment montée et mise au service d’une perspective diplomatique qui
consisterait à créer des parts entiers d’insécurité sur le territoire national où seraient perpétrées d’épouvantes atrocités. Par l’effet du fait accompli et d’opportunité, le
gouvernement congolais élaborerait une nouvelle position politique à imposer au
prochain sommet conjoint CIRGL-SADC qui statuera, entre autres, sur l’expiration du délai du désarmement volontaire des FDLR. En clair, le Gouvernement congolais entendrait occuper à d’autres priorités les FARDC pour se constituer une parfaite cause d’excuse pour les opérations du désarmement forcé que l’armée régulière conjointement avec la Brigade d’Intervention des Nations-Unies devraient conduire contre les FDLR et autres groupes armés locaux et étrangers àpartir du 2 janvier 2015.
4. En fin, rassurer l’opinion que la création des zones d’insécurité n’a pas comme objectif d’introduire l’idée de voir écarter certains territoires administratifs des élections prochaines prévues en 2016 par l’actuelle constitution, ce qui serait jugé inacceptable et conduirait, à coup sûr, au report desdites élections jusqu’au rétablissement des conditions favorables à leur bonne tenue sur toute l’étendue du territoire national. Les craintes de notre Mouvement sur la
situation sécuritaire actuelle dans le pays procèdent de sa propre expérience vécue pendant ses moments de rébellion où nous avons servi pendant longtemps de bouc-émissaire à des
situations malencontreuses et dramatiques relevant, en réalité, soit de l’incapacité ou de l’absence de volonté politique, soit encore des simples machinations du gouvernement de la
République. Cette politique de bouc-émissaire qui a élu domicile dans notre pays ne vise qu’à perdre l’opinion sur les réelles causes de la situation de précarité permanente que subissent nos populations. Le musèlement actuel de la presse locale du “grand-nord” rentre dans le cadre de cemodus operendi habituel pour faire taire l’opinion contraire à celui du gouvernement sur les faits. C’est donc une décision liberticide. Ces morts congolais sont également des habitants des Grands-Lacs, des Africains, des citoyens du Monde protégés non seulement par la constitution de la République Démocratique du Congo spécialement en ses articles 16, 69 et 91 mais également par les différents traités et conventions internationales ratifiés par la République Démocratique du Congo. C’est pour ce motif que la Direction du Mouvement du 23 Mars en appelle à la tenue d’un sommet extraordinaire des signataires de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba pour statuer de manière urgente sur la situation actuelle dans l’Est de notre pays, spécialement celle qui prévaut dans le secteur de Beni. Ledit sommet devrait diligenter une commission d’enquête indépendante susceptible d’apporter la lumière sur les rôles joués par les différentes forces armées présentes dans cette partie du pays dans les événements actuels. L’on éviterait, ainsi, que des citoyens du monde en général et ceux de la partie Est de la RDC ne servent continuellement d’holocauste pour des fins de positionnement politique et ceux qui les tuent ne passent pour des anges de lumière
Fait à Kampala, le 25 novembre 2014.
Le Président du Mouvement du 23 Mars
Bertrand BISIMWA