Le Potentiel
19/03/07
Double nationalité, massacres du Bas – Congo, situation financière catastrophique, spoliation du patrimoine national, affaire Kahemba, retrait des éléments de la garde rapprochée de Ruberwa et de Bemba….cela fait trop de dossiers pour des nouvelles institutions qui viennent à peine d’être mises en place. Joseph Kabila et Gizenga ploient sous l’avalanche de nombreuses affaires qui exigent des réponses dans les meilleurs délais. Pendant ce temps, les « cinq chantiers » peinent à démarrer trois après leur annonce.
Des missions d’enquête ont été diligentées au lendemain des graves incidents qui ont émaillé l’élection du gouverneur et du vice – gouverneur du Bas – Congo. Plus d’une centaine de personnes, des civils et des militaires, ont été tuées à la suite de la protestation des adeptes de la secte Bundu dia Kongo. Il faut déterminer les vraies causes de ces graves incidents et établir la part de responsabilité. Si la justice est saisie de l’affaire, l’Assemblée nationale l’est également par le truchement des députés Ne Kongo. Elle a à son tour initié son enquête. Les résultats sont attendus avec impatience.
Coincée et quasiment bloquée dans son fonctionnement par la question de la double nationalité, l’Assemblée nationale a fini par lever l’option d’une solution politique. Un moratoire a été accordé aux personnes concernées pour se mettre en ordre. Il est même possible qu’il soit envisagé la révision de cette disposition constitutionnelle.
Une affaire en appelant une autre, les dossiers se accumulés à un rythme infernal. Comme pour confirmer la maxime selon laquelle un malheur ne vient jamais seul. Une autre affaire aux conséquences imprévisibles est tombée dans le panier du gouvernement et de l’Assemblée nationale. Il s’agit de l’occupation de onze villages du territoire de Kahemba, dans la province de Bandundu. Une crise frontalière que l’Angola et la République démocratique du Congo tentent de gérer au mieux de la diplomatie discrète et ouverte.
Tout est parti de la déclaration du ministre de l’Intérieur du 29 janvier 2007, suivie de la note protestation du ministère des Affaires étrangères de la Rdc, soutenue par une déclaration des députés du Kwango – parmi lesquels un ancien ministre de l’Intérieur – qui confirment l’occupation d’une portion du territoire congolais par des troupes angolaises.
Mais, retournement de la situation, la réunion de Kinshasa entre la partie angolaise et congolaise conclut qu’il n’ y a pas de troupes angolaises en Rdc. Angolais et Congolais conviennent de tout mettre en oeuvre pour régler à l’amiable ce qu’elles appellent une « incompréhension ».
Par ailleurs, entre les deux affaires, le Gouvernement se trouve confronté à une grave situation financière. Le Premier ministre a constaté un gouffre financier qu’il s’est empressé de qualifier de catastrophique. La spoliation du patrimoine national n’a pas non plus redressé cet héritage légué par le gouvernement de la transition. Antoine Gizenga est privé des moyens de sa politique. Comme si cela ne suffisait, le retrait des éléments de la garde rapprochée des anciens vice-présidents de la République continue à entretenir la panique à Kinshasa ; malgré les appels au calme lancés par le ministre de la Défense et la Monuc. Les « arrangements particuliers » attendus risquent de prendre le pas sur des dispositions constitutionnelles eu égard à la « crise de méfiance » qui persiste. Autant de problèmes qui interpellent au premier chef le chef de l’Etat et le Gouvernement Gizenga.
LES 5 CHANTIERS RETARDES
Les premiers pas de la IIIè République annoncent que l’on n’est pas encore sorti de l’auberge. La zone de turbulence semble perdurer avant d’atteindre la vitesse de croisière. Trois mois après son investiture, Joseph Kabila et Gizenga semblent faire du sur place. Du fait de toutes ces pesanteurs qui s’abattent toutes à la fois et ne laissent aucun répit aux nouvelles institutions. Celles-ci sont mises à rude épreuve à telle enseigne que les principaux animateurs doivent faire preuve de haute responsabilité politique et de compétence pour qu’il n’y ait pas de dérapages compromettants. Cela par rapport aux cinq chantiers annoncés et qui fondent l’action du gouvernement. Trois mois après leur annonce, aucun des cinq chantiers n’est perceptible sur le terrain. Et dire que la majorité au pouvoir n’a plus que quatre ans pour se présenter à nouveau devant le souverain primaire.
Il est donc important que les différentes commissions d’enquête qui ont été mises en place puissent rapidement livrer leur secret. Il y va ici de la crédibilité des institutions de la République. Elles doivent démêler l’écheveau car, la population a droit à la vérité. Un droit inaliénable au nom duquel les « faiseurs des coups montés » doivent être découragés. Il y va aussi de la transparence et de la bonne gouvernance en vue de sauver la jeune démocratie naissante en Rdc encore otage des mises en scène indigestes.
Pour le cas des massacres du Bas – Congo et de l’ Affaire Kahemba, les enquêtes doivent absolument aboutir. Dans le premier cas, il y a eu mort d’hommes. Un crime imprescriptible dans la lutte contre l’impunité, la violation des droits humains. Un crime contre le respect des textes. Bref, un crime contre la Démocratie.
Dans le second cas, c'est-à-dire, l’Affaire Kahemba, c’est l’Assemblée Nationale et le Gouvernement qui sont directement mises en cause. Elles doivent indiscutablement préserver leur honneur. Devant ces déclarations contradictoires entre les élus du Kwango, le ministère de l’Intérieur et des Affaires étrangères, les chefs coutumiers, c’est tout le crédit de l’Etat congolais qui est en jeu. Plus grave, ces contradictions mettent à nu le manque de solidarité inter – institutionnelle. Une affaire qui pourrait avoir des effets d’entraînement négatifs sur notre diplomatie tant sur le plan régional qu’international. Admettons que par aventure politique, ce soit un coup monté. Qui en sont les auteurs et quel est le but visé ? Que cache réellement cette affaire ? Il s’agit ici d’une autre forme de « guerre de déstabilisation » que l’on cherche à imposer de nouveau à la République démocratique du Congo. L’affaire ne peut être classée sans suite.
Parallèlement, des audits doivent être initiés rapidement en ce qui concerne la situation financière catastrophique du pays, la spoliation du patrimoine national et l’accélération du processus d’intégration de l’Armée. Ces actions sont très attendues par les partenaires extérieurs pour apprécier la capacité des animateurs des institutions de la République à restaurer effectivement un Etat classique.
Le débat qui se déroule actuellement en Occident sur la mise sous tutelle internationale de la gouvernance en République démocratique du Congo s’inscrit dans ce contexte. Bruxelles a donné le ton dans le cadre de l’Union européenne. Demain, ce sera le tour des Etats-Unis et des Institutions financières internationales. Qu’on ne se leurre pas. Le but cherché est de doter la Rdc des institutions fortes, dépersonnalisées, susceptibles de placer ce pays sur la voie du progrès. Tâche que doivent assumer les « professionnels » de la politique et non des amateurs qui doivent encore apprendre leur b.a.ba.
D’ores et déjà, la multitude de ces affaires constitue des pesanteurs périlleuses qui font perdre du temps précieux aux institutions de la troisième république.
Le Potentiel