Pierre-Antoine Souchard
17/10/09
Agathe Habyarimana, la veuve du président rwandais Juvénal Habyarimana, mort dans un attentat le 6 avril 1994 avec son homologue burundais, Cyprien Ntaryamira, ne bénéficiera pas du statut de réfugié en France.
Le Conseil d’Etat a rejeté vendredi son recours. L’ex-première dame rwandaise vit en région parisienne depuis plusieurs années.
« Visée par une information judiciaire »
La plus haute juridiction administrative française a repris les arguments de la décision de la Commission de recours des réfugiés (CCR) pour justifier son refus. Le 15 février 2007, la CCR avait considéré que Mme Habyarimana avait joué un rôle central dans la préparation du génocide et dans les tout premiers jours de celui-ci.
Exfiltrée par les forces françaises le 9 avril 1994, Mme Habyarimana est restée, après son départ, en contact avec le gouvernement intérimaire. Ses détracteurs assurent qu’elle était membre de l' « azazu » (NDLR : la maison), cercle d’extrémistes hutus qui ont fomenté le génocide.
Son avocat, Me Philippe Meilhac, n’est pas surpris par cette décision. « Le paradoxe, c’est qu’on affirme qu’elle est une instigatrice du génocide pour refuser de lui accorder l’asile mais ni la justice internationale ni la justice française ne la poursuivent », a-t-il déclaré vendredi à France-Soir.
Visée par une information judiciaire ouverte en novembre 2007 pour « complicité de crime contre l’humanité » et « complicité de génocide », Mme Habyarimana n’a pas été entendue par les enquêteurs et encore moins par les deux juges d’instruction parisiens.
« Sa seconde patrie, c’est la France »
Que risque-t-elle dorénavant ? En théorie, elle pourrait faire l’objet d’une mesure d’éloignement que pourrait mettre en œuvre le ministère de l’Immigration.
« Sa seconde patrie, c’est la France. Mme Habyarimana a compris qu’on ne voulait pas lui accorder l’asile, mais elle entend vivre auprès des siens, qui ont bénéficié de ce statut en France », nous a indiqué Me Meilhac. L’attentat contre l’avion de son mari est considéré comme l’élément déclencheur du génocide de 1994 qui fit plus de 800.000 morts.
« Il est temps que la France mette tout en œuvre pour que la justice passe », nous a déclaré Alain Gauthier, président du Collectif des parties civiles pour le Rwanda. Selon nos informations, la juge Fabienne Pous, l’une des magistrates en charge des dossiers rwandais, se trouve actuellement en mission au Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) à Arusha en Tanzanie.
France Soir