AFP
05/12/08
HARARE (AFP)- La pression internationale s'accentuait vendredi sur le régime du président zimbabwéen Robert Mugabe, dont les Etats-Unis demandent le départ et qui compte désormais sur l'aide étrangère pour juguler une épidémie de choléra en pleine expansion.
Paralysé depuis des mois, plongé dans une crise politique qui reste sans issue, le pays n'en finit plus de s'effondrer sur le plan économique, alimentaire et sanitaire.
L'épidémie de choléra, décrétée jeudi par le pouvoir "urgence nationale", a déjà provoqué la mort de 575 personnes et en a contaminé 12.700, selon les Nations unies. La seule capitale, Harare, comptait jeudi soir 179 victimes et 6.448 cas suspects, selon le Bureau de coordination des Affaires humanitaires (Ocha) à Genève.
Vendredi matin, lors d'un déplacement à Copenhague, la secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice a appelé à la démission du président. "Il est temps pour Robert Mugabe de partir. Je pense que c'est désormais une évidence", a-t-elle déclaré.
"Les Zimbabwéens sont les seuls à pouvoir dire à Mugabe de partir à travers les voies constitutionnelles", lui a rétorqué le ministre zimbabwéen de l'Information, Sikhanyiso Ndlovu.
L'Union européenne devrait lundi renforcer ses sanctions contre le régime en ajoutant une dizaine de noms à la liste des personnes interdites d'entrée dans l'Union, a indiqué pour sa part un responsable de l'UE.
Le ministre britannique des Affaires étrangères David Miliband a pour sa part dénoncé le régime "voyou" du Zimbabwe, et estimé que l'épidémie de choléra montre que Robert Mugabe a brisé les espoirs de changement.
"La détérioration de la situation au Zimbabwe n'est qu'une nouvelle illustration de l'incompétence du gouvernement voyou du Zimbabwe", a estimé M. Miliband, dans un communiqué.
De son côté, l'Afrique du Sud a annoncé qu'elle enverrait la semaine prochaine à Harare des experts chargés d'évaluer les besoins de son voisin, tout en invitant les responsables politiques zimbabwéens à dépasser leurs querelles.
"L'heure n'est plus au comptage de points", a martelé le porte-parole du gouvernement sud-africain, Themba Maseko.
"Je serais extrêmement surpris si l'épidémie de choléra, la mort de Zimbabwéens innocents comme résultat de l'échec des politiciens à se mettre d'accord, ne les poussaient pas enfin à prendre des mesures urgentes", a-t-il ajouté.
Jeudi soir, le Premier ministre kényan Raila Odinga avait lui aussi jugé nécessaire le départ de M. Mugabe, qui préside aux destinées du Zimbabwe depuis 1980. "Il est temps pour les gouvernements africains d'entreprendre des actions décisives pour l'écarter du pouvoir", a-t-il déclaré.
L'épidémie de choléra se développe très rapidement dans un pays dont le système de santé est complètement délabré, les réseaux d'eau et d'assainissement en panne, l'inflation délirante, les personnels de santé démobilisés.
Elle risque de s'étendre à l'Afrique du Sud si les conditions de vie des réfugiés ayant franchi la frontière pour fuir la maladie ne sont pas améliorées, selon l'organisation Human Rights Watch (HRW).
"Nos hôpitaux ne fonctionnent absolument pas", a reconnu jeudi le ministre de la Santé, David Parirenyatwa, en lançant un appel à l'aide internationale.
Le Royaume-Uni, ancienne puissance coloniale, a débloqué dans la foulée une aide de 10 millions de livres (11,5 millions d'euros).
"Pour une fois, nous sommes d'accord avec le gouvernement du Zimbabwe. C'est une urgence nationale", a déclaré le Premier ministre Gordon Brown. "L'Etat défaillant de Mugabe n'est plus capable, ou n'a plus la volonté, de protéger son peuple, des milliers de personnes sont frappées par le choléra, et il faut les aider d'urgence".
M. Mugabe continue quant à lui de parler politique, menaçant d'organiser de nouvelles élections dans un délai de deux ans si l'accord de partage du pouvoir avec l'opposition n'était pas mis en oeuvre.
"Nous nous sommes mis d'accord pour donner (à l'opposition) 13 ministères et pour partager le portefeuille de l'Intérieur. Mais si cet accord ne fonctionne pas dans l'année et demie ou les deux ans qui viennent, nous organiserons des élections", a-t-il déclaré, cité vendredi dans The Herald.
L'accord signé le 15 septembre avec l'opposition pour sortir de la crise née de la défaite du régime aux élections de mars dernier est resté à ce jour sans effet.
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