Rwanda: Criminel de guerre: Jugé à Montréal pour génocide.

Canoë

26/03/07

C'est une de ces histoires sanglantes, dépassant toute logique, comme il y en a eu des dizaines au Rwanda en 1994. Dès demain, au palais de justice de Montréal, l'auteur présumé de dizaines de meurtres et viols commis pendant la boucherie sera jugé pour génocide, crime contre l'humanité et crime de guerre.

Désiré Munyaneza, 40 ans, s'est réfugié au Canada après le génocide, craignant pour sa sécurité s'il restait dans son pays.

Et pour cause, puisque ce Hutu aurait été un élément fort actif du massacre de l'autre ethnie du pays, les Tutsis.

Dans la préfecture de Butare, il aurait commis un nombre indéterminé -mais qui pourrait s'élever à 200- de meurtres de civils, des attentats sur des personnes, de la violence sexuelle et du pillage.

Une fois réfugié au Canada, tant la Commission du statut de réfugié que la cour fédérale, en 2002, lui refusait le titre de réfugié, à cause des soupçons que l'on entretenait sur sa participation au génocide.

Mais étonnamment, il ne fut pas déporté.

C'est qu'à l'époque, la GRC travaillait de concert avec le Tribunal criminel international sur le Rwanda. On voulait ainsi laisser à la police le temps de terminer son enquête sur Munyaneza en vue de l'accuser ici plutôt que de prendre le risque de le voir disparaître.

Après avoir été arrêté à Toronto, il comparaissait le 20 octobre 2005 à Montréal.

Il est détenu depuis.

Désiré Munyaneza sera le premier individu à subir un procès en vertu de la loi canadienne sur les crimes contre l'humanité sanctionnée en 2000.

Des accusations à faire frémir

Les chefs d'accusation qui pèsent contre lui font frémir:

Meurtre intentionnel et atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale des Tutsis dans l'intention de détruire en tout ou en partie ce groupe de personnes, commettant un crime de génocide.
Meurtres intentionnels de civils tutsis accompagnés d'actes de violence sexuelle, ce qui constitue un crime contre l'humanité.
Crime de guerre par la commission de meurtres, violence sexuelle et pillage au cours du conflit armé entre les Forces armées rwandaises (FAR) et le Front patriotique rwandais.
Avec ses dizaines de témoins qui ont vécu les horreurs du génocide sur le terrain, qui sont eux-mêmes des acteurs ou des victimes, et des experts internationaux de cette tragique page de notre histoire, le procès de Désiré Munyaneza nous plongera en plein coeur de ce drame que l'on a encore du mal à comprendre.

S'il est trouvé coupable, Désiré Munyaneza est passible de l'emprisonnement à perpétuité.

Un long procès

Avec ses dizaines de témoins, le procès de Désiré Munyaneza pourrait s'étendre sur quatre mois.

C'est le juge de la Cour supérieure André Denis, qui devra décider du sort à réserver à Munyaneza, qui a préféré ne pas être jugé par un jury.

Dès lundi, des témoins civils rwandais témoigneront des atrocités vécues à Butare en 1994.

Témoignages

Certains témoigneront en personne dans la salle 5,01, dédiée à ce procès, et d'autres témoignages seront présentés sur vidéo, puisqu'ils ont été recueillis à Kigali en janvier et février derniers.

C'est que pendant plus d'un mois, les avocats des deux parties et le juge André Denis ont tenu une commission rogatoire dans les locaux de la Cour suprême du Rwanda, afin d'y faire témoigner, tout en les filmant, les témoins ne pouvant se déplacer à Montréal pour le procès.

Cette première portion du procès devrait durer un bon mois et demi, selon un des procureurs fédéraux au dossier, Me Richard Roy.

Ensuite, les policiers canadiens qui ont enquêté sur les atrocités présumément commises par Désiré Munyaneza rendront compte de leur travail.

Puis, juin sera le mois du cours intensif sur le génocide rwandais.

Des experts qui ont mené diverses recherches sur la tragédie viendront instruire le tribunal sur ce conflit. 

 

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